Mais qui est donc Carcasse, figure aussi fragile qu’obstinée, dont on ne peut savoir s’il est homme ou femme et qui se tient debout sur un seuil, dont on ne sait rien sauf qu’il voudrait le franchir et qu’il ne sait ni pourquoi ni comment le faire?
Curieuse figure vide et trouée, au nom improbable et sans fonction, mais qui vit intensément l’expérience de l’immobilité, bloquée sur le seuil de son époque. C’est comme s’il n’existait pas encore tout à fait et pourtant, comme on dit, il se pose là, trouble, dérange, fait obstacle.
Autour de lui, Plusieurs aussi sont là et plissent les yeux, cherchant à reconnaître une position rassurante chez cet autre qui ne sait pas être comme eux. Alors une chose est sûre, Carcasse nous ressemble étrangement, qui cherche maladroitement une présence au monde, avide d’humanité dans sa demande incertaine et naïve.
Alors une chose est sure, Plusieurs nous ressemble étrangement, qui peine à prendre l’autre comme il est, à aller vers lui sans jugement, sans peur, sans défiance, sans vouloir qu’il soit à l’avance un être déterminé. Avec humour, par traits incisifs et mouvements successifs, Mariette Navarro peint ici un rejeton du Plume de Michaux aux prises avec le monde, avec les autres, avec l’époque : Carcasse voudrait être contre, mais doit faire avec.
Et si cette embarrassante contradiction était, pour Carcasse comme pour nous, le seuil à franchir ?